L'appel et la pêche

Publié le par Eric George

peche.jpgPrédication du 14 février 2010

Esaïe VI, 1-8

I corinthiens XV, 1-11

Luc V, 1 à 11

 

Buisson ardent, chemin de Damas, l’appel de Dieu évoque chez nous des images spectaculaires. Pourtant et si l’appel était simple comme une partie de pêche ?

 

Les trois textes que nous avons entendus ce matin sont des récits d’appel. Mais un élément lie étroitement le récit de vocation d’Esaïe à celui des premiers disciples dans l’évangile selon Luc, Simon-Pierre et Esaïe réagissent de la même manière : « Je suis un homme pêcheur » « Je suis un homme aux lèvres impures". Face à la gloire de Dieu, Simon Pierre et Esaïe affirment leur limite, leur petitesse d'homme, ils manifestent cette crainte qui est de l'ordre du respect et de l'humilité plus que de la peur.

Mais ce trait commun nous conduit à souligner l'immense différence entre les deux textes. Le prophète voit Dieu se manifester dans le Temple, dans un contexte éminement religieux. En fait, la vision d'Esaïe est une amplification de ce qui est visible dans le Saint des Saints, une pleine manifestation de la gloire qui est symbolisée par l'Arche d'Alliance et les Séraphim.

En revanche, pour Simon-Pierre et les autres disciples, cette manifestation survient dans le cadre de leur travail, au coeur de leur vie quotidienne. Dieu passe de la sphère religieuse à la sphère profane. Ainsi, l'évangile selon Luc témoigne d'un Dieu qui nous rejoint là où nous sommes et non plus d'un Dieu vers lequel il nous faut nous élever par notre pratique religieuse.

 

C'est donc ainsi que va commencer la mission des apôtres, par un appel qui les saisit au beau milieu de leur vie de tous les jours. Luc nous le signale en nous offrant une scène de pêche très vivante et détaillée. On y voit les pêcheurs travailler ensembles pour encercler les poissons de leurs filets, manoeuvre délicate qui demande plusieurs barques agissant de concert et donc une très bonne coordination.

Mais cette description n'est pas seulement un documentaire sur la pêche sur le lac de Génésareth. En plantant son décors, Luc ne se contente pas d'insister sur le quotidien dans lequel les disciples sont appelés, il va aussi nous présenter, à travers la mission qui leur est confiée.

 

En effet, premier constat, Dieu ne nous appelle pas pour notre épanouissement personnel. Quand il se manifeste à nous, quand il éveille notre foi, il nous confie aussi une mission. C'est bien l'expérience qu'ont faite Esaïe, Simon-Pierre, Paul et tant d'autres témoins bibliques : que l'on soit religieux, simple pêcheur, collecteur de taxes, recevoir la bonne Nouvelle, c'est être appelé à proclamer à son tour. "Tu seras pêcheur d'homme"

 

Deuxième constat : cette pêche aux hommes est à l'image de la pêche miraculeuse : Pierre a pêché toute la nuit, il a déployé tout son savoir-faire à la meilleure heure, quand les conditions étaient les plus favorables mais ça a été en vain. Et alors que le moment est passé, alors que la fatigue amoindrit ses capacités, quand il relance les filets à la demande de Jésus, la pêche est prodigieusement abondante.

Notre pêche aux hommes ne dépendra pas de nos compétences, de notre application, des conditions dans lesquelles nous témoignerons de la Bonne Nouvelle. Le succès de notre pêche ne sera dû qu'au vouloir de notre Dieu.

Et pourtant, tout comme Simon Pierre, nous sommes appelés à participer pleinement à cette pêche. La pêche miraculeuse n'est pas la pluie de cailles de la traversée du désert, l'évangile ne nous dit pas que de "tous les côtés du navire, les poissons vinrent à sauter ohé ohé". Pierre et ses associés vont accomplir leurs gestes de tous les jours, ils vont déployer leurs compétences, s'impliquer pleinement dans cette pêche, bref, ils vont travailler.

De la même manière, si le succès de notre annonce ne dépend pas de nous, nous n'en sommes pas moins appelés à fournir un effort, à engager notre savoir-faire. Jésus ne nous appelle pas à nous tenir sur le rivage pour observer le spectacle mais bien à mettre notre barque à l'eau, à jeter nos filets, à travailler.

 

Et, c'est le troisième constat, à travailler comme Pierre et ses associés : ensembles. En utilisant la pêche comme image de notre mission de chrétiens, Jésus nous rappelle que cette tâche à laquelle nous sommes appelés n'est pas un travail solitaire. Pêcher seul, c'est voir la barque chavirer, les filets se briser, les poissons s'échapper. Pêcher seul c'est tout simplement impossible.

Il en va de même de l’annonce et du témoignage. Il faudrait être un géant de la foi et de la spiritualité pour pouvoir annoncer seul face à nos frères et nos sœurs l’amour de Dieu, la vie à laquelle il nous invite. C’est une mission trop lourde, trop immense pour un individu isolé. C’est ensembles que nous serons porteurs d’une bonne nouvelle, c’est ensembles que nous serons témoins de l’amour de Dieu.

Travailler ensemble, c’est faire équipe. Mieux, c’est faire corps ! Cela demande de la coordination, c'est-à-dire de la compréhension mutuelle, de la confiance et donc de la communication. Tout comme Pierre fit signe à l’autre barque, sachons demander de l’aide à nos frères et sœurs en Christ, sachons répondre aux demandes d’aide. Le travail en équipe fait partie du savoir faire que nous sommes appelés à exercer pour l’annonce de l’Evangile

 

Frères et sœurs, réjouissons-nous, notre Dieu nous rejoint dans notre quotidien.

Réjouissons-nous, il nous appelle à déployer notre savoir-faire, nos compétences. Il nous invite à la joie du travail bien fait.

Réjouissons-nous, il nous donne de n’être pas seul mais de travailler en équipe, en communion, en fraternité.

Réjouissons-nous car il nous promet une pêche innombrable, miraculeuse.

Réjouissons-nous et lançons notre barque à la mer : il fait de nous des pêcheurs d’hommes.

Publié dans Prédications

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